Côte Sud des Landes - N°75 - Septembre/Octobre 2006

La guerre du surf

Alors que Biarritz s’apprête à construire une «Cité du surf», les Landes annoncent une série d’investissements visant à conforter leur position de spot incontournable de la côte atlantique.

 

A l’origine, plus qu’un sport, le surf était une philosophie de vie. De beaux mâles aux torses musclés tentaient de chevaucher des vagues vertigineuses pour le seul plaisir de faire corps avec l’océan. De cette époque baba cool, il ne reste plus guère que quelques Combis Volkswagen poussiéreux. Fini le peace and love, fané le flower power. Aujourd’hui, le surf est le centre d’une guéguerre à laquelle se livrent les côtes basque et landaise. L’enjeu est de taille : déterminer qui de Biarritz ou de Hossegor possède la vague la plus mythique…

En cinquante ans, les surfeurs sont passés du statut de doux dingues rêveurs à celui de VIP plus convoités que l’eau dans le Sahel. La raison de ce revirement : le poids économique qu’ils représentent. En Aquitaine, le secteur de la glisse compte 350 entreprises employant quelque 3 000 salariés et générant un chiffre d’affaires de 900 millions d’euros. On comprend mieux les efforts des stations pour chouchouter les funambules des vagues.

En 2004, Biarritz, qui revendique la paternité de la pratique en Europe, a ainsi annoncé son intention de construire une «Cité du surf». Ce temple de la glisse, dont le coût estimé approche les onze millions d’euros, devrait ouvrir ses portes en 2008. La réalisation, confiée à l’architecte new-yorkais Steven Holl (à qui l’on doit le Nelson Atkins Museum of Art de Kansas City, le Massachusetts Institute of Technology ou le musée d’art contemporain de Helsinki), abritera un musée, des espaces d’expositions et une place ouverte à des rassemblements. Elle comprendra également un centre de ressources visant à «attirer l’attention sur les problèmes des océans et à explorer les aspects scientifiques de la pratique du surf».

Avec tout cela, on voyait déjà Biarritz devenir le spot incontournable et incontesté de la côte aquitaine. C’était sans compter les Landes. Bien décidé à conserver son leadership sur la discipline (aujourd’hui, un surfeur français sur cinq est landais), le département vient d’annoncer un vaste programme d’intervention dans le domaine. Première action envisagée : offrir un nouveau siège à la Fédération française de surf (FFS).

 

2 000 m² en front de mer

 

Installée dans les Landes en 1977 et à Hossegor depuis 1984, la FFS se sent aujourd’hui à l’étroit dans ses locaux de l’impasse de la Digue Nord qu'elle partage avec le Hossegor Surf Club. «Notre activité est en vogue et connaît un développement exponentiel», explique Jean-Luc Arrasus, le président. «Alors que nous revenons du Brésil avec un titre de champion et un de vice-champion du monde junior, nos locaux ne sont plus adaptés à notre rang de leader européen.»

sl75-13ar.jpgApprenant le désir de la Fédération de déménager, Bordeaux et Biarritz ont déployé le tapis rouge pour l’accueillir, mais Hossegor a refusé de lâcher prise. «Il y a vingt ans, rares étaient ceux qui croyaient que le surf allait devenir un sport et surtout une économie, rappelle Pierre Dussain, le maire de la commune. Nous avons fait ce pari et anticipé les évolutions de la société en permettant à des PDG en tongs et bermudas de créer des usines relais dans la zone Pédebert, et en mettant à la disposition de la FFS un bâtiment municipal.» Aujourd’hui, il n’est donc pas question que la poule aux œufs d’or aille pondre ailleurs. C’est pourquoi la commune lui a réservé un terrain de 2 000 m² en front de mer, le long du boulevard de la Dune, à un jet de pierre de Capbreton. C’est là que, début 2008, devrait ouvrir le nouveau siège de la FFS.

Estimé à 600 000 €, le projet sera financé à hauteur de 40 % par le Conseil général et de 40 % par le Conseil régional. L’Etat sera sollicité pour les 20 % restants. Le bâtiment occupera 330 m² et sera entièrement «écoconstruit». En plus d’objectifs purement sportifs, la FFS porte en effet des valeurs citoyennes et entend faire de son nouveau quartier général «une vitrine et un outil pédagogique au service de l’éducation à l’environnement». La construction répondra aux normes de Haute qualité environnementale (HQE) : elle devra s’intégrer au maximum dans le milieu fragile du front de mer et limiter les impacts négatifs de son utilisation. Des visites du site pour les scolaires permettront à la Fédération de faire connaître le surf aux plus jeunes tout en les éveillant au respect de la nature. Avec ce bâtiment, la FFS a l’ambition de réaliser la première infrastructure sportive écoconstruite en Aquitaine et d’encourager les clubs, les comités et les autres fédérations à la suivre dans cette voie.

 

La formation à Port d'Albret

 

Non contente de se faire offrir un nouveau siège, la FFS va également disposer sous peu d’un centre de formation à Port d’Albret Sud. L’analyse de ses besoins a en effet montré qu’elle manquait de locaux pour la formation, la logistique et les sièges des instances décentralisées (ligue régionale et comité départemental).

Sur un airial d’un hectare, situé à proximité de l’UCPA (Union nationale des centres sportifs de plein air), le projet remplacera celui de pôle universitaire consacré au tourisme, un temps évoqué. Un bâtiment de 290 m², composé de bureaux et de salles de travail, devrait ouvrir pour l’été 2007. Estimé à 500 000 €, il sera lui aussi financé par le Conseil général (40 %), le Conseil régional (40 %) et l’Etat (20 %).

Reste un troisième projet un peu fou, «un rêve» selon le président du Conseil général Henri Emmanuelli : construire, toujours sur la zone d’aménagement concerté de Port d’Albret, la première vague artificielle d’Europe. «Cet équipement très technique et sans équivalent nous permettrait de nous positionner comme un ensemble complet d’activités économiques et de loisirs en relation avec le surf.»

 

Vague artificielle

 

Cette piscine d’un nouveau genre permettrait «un bond considérable en terme d’entraînement», estime Jean-Luc Arrasus. En surf, il faut «8 000 répétitions pour acquérir un geste». Or, dans l’océan, les pratiquants ne peuvent compter que sur six vagues exploitables par heure en moyenne. Grâce à des vagues modulables d'au moins deux mètres cinquante toutes les douze secondes sur une distance d'environ cent mètres, le projet serait «un outil pédagogique très pertinent». Les novices pourraient apprendre à tenir debout sur une planche «en une journée» et les confirmés améliorer leur technique. Le bassin à vagues permettrait également l'essai de matériels, dans un souci d'une politique de développement de la recherche de cette filière. Le seul équipement comparable au monde est actuellement en construction à Orlando, en Floride. Le projet landais s’inscrit lui dans le moyen terme, d’ici cinq ou six ans. Néanmoins, les choses avancent. En mars, le Conseil général a confié à la SATEL (Société d'aménagement touristique et d'équipement des Landes) l'étude de faisabilité de cet investissement. Et avant la fin de l’année, des experts néo-zélandais du groupe ASR (qui a conçu le process du bassin d'Orlando) devraient même venir étudier le projet sur place…

Les Landes comptent sur leurs atouts naturels pour voir aboutir le projet : une nappe d'eau de mer à la sortie du courant de Port d'Albret garantissant une eau salée de grande qualité, et une nappe géothermique, sous le site, qui permettrait de chauffer l'eau du bassin en période hivernale.

 

Photos : FFS - surfingfrance.com

 


Vers un pôle de compétitivité «glisse»

 

Après la labellisation en juillet 2005 de quatre pôles de compétitivité en Aquitaine («Aérospace valley : aéronautique, espace et systèmes embarqués», «Prod’innov : aliments et santé», «Industrie et pin maritime du futur», «Route des lasers»), la Région a souhaité préparer la candidature de quatre pôles supplémentaires. Le premier sera consacré aux énergies propres (Énergie et environnement), le second à l’habitat (Construction, aménagement et habitat durables), le troisième à la viticulture (Bordeaux - Aquitaine Inno’vin). Le dernier aura pour thème la «Glisse».

Le 13 avril, une réunion de travail regroupant les principales industries du secteur, les collectivités locales concernées et les organismes associés a jeté les bases du futur pôle et a confié à l’école d’ingénieurs Estia Innovation de Bidart (Pyrénées-Atlantiques) une étude de faisabilité. Ses conclusions comprenant une analyse des atouts et des faiblesses de la région, une définition des besoins des entreprises, une proposition de stratégie pour les dix ans à venir et les préconisations en matière de formation et de recherche et développement, indispensables à la réussite du projet, permettront de déposer rapidement un dossier de candidature pour la labellisation de ce nouveau pôle auprès des services de l’Etat

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