Les festivals cultivent les différences
Petit voyage dans l'espace avec le conte et dans le temps avec le jazz : les festivals du mois d'août invitent à la découverte de l'autre.
Comme chaque année, le mois d'août sera festif à Capbreton. La cité portuaire programme, en l'espace de trois semaines, les deux moments phares de son agenda culturel : le Festival du conte (du 1er au 4 août) et Fugue en pays jazz (du 16 au 19). Des festivals devenus incontournables par leur longévité : le premier en est à sa 23e édition, le second à sa 22e ! «A Capbreton, on aime les histoires qui durent», sourit Christian Nogaro, directeur artistique de Fugue en pays jazz. Encore faut-il savoir se renouveler, année après année, pour ne pas lasser un public fidèle. Les équipes organisatrices des deux manifestations l'ont compris qui ont décidé, chacune à leur manière, de célébrer les différences. «Le Festival du conte va mettre en avant la diversité dans l'espace, celui de jazz la diversité dans le temps», résume Patrick Laclédère, premier adjoint au maire.
Voyage, voyage
Le Festival du conte invite ainsi à un voyage immobile aux quatre coins du monde, et même au-delà, sur le thème «Gens d'ailleurs ?». Mais pas question de considérer «l'ailleurs comme exotique, amusant et synonyme d'évasion au petit sens du terme», prévient Marie-José Germain, directrice artistique du festival. Ici, l'ailleurs se comprend comme une rencontre avec l'autre, une plongée «en humanité profonde»... pour au final s'apercevoir que ces gens d'ailleurs ne sont pas si différents des gens d'ici.
Pour servir le propos, les organisateurs ont sélectionné des artistes venus de France, d'Algérie, de Belgique, du Japon et du Québec et qui présentent «des spectacles très forts». Avec Cité Babel, Rachid Bouali partage son récit de vie dans une barre HLM de la banlieue de Roubaix (jeudi 2 août, 21h30, casino). Dans Ny, Michèle Nguyen raconte son enfance bercée par la féroce présence de sa grand-mère qui n'aimait pas les «enfants jaunes» (jeudi 2 août, 14h30 et vendredi 3 août, 10h, casino). Renée Robitaille a recueilli pendant deux ans les témoignages des habitants du Moyen Nord québécois pour construire son spectacle Le Chant des os (vendredi 3 août, 21h30, casino). Le festival permettra aussi de retrouver Catherine Zarcate qui présentera L'arche du temps (titre provisoire), un «bijou de pure fantaisie à l'humour débridé et déjanté» qu'elle a mis au point lors de ses résidences artistiques dans la commune en mars et juin derniers (vendredi 3 et samedi 4 août, 14h30, casino). En marge de ces spectacles payants portés par des conteurs traditionnels, des parenthèses décalées seront offertes au public chaque jour avec Nozomi Horie et Takeshi Shibasaki, un couple de mimes japonais (mercredi 1er et jeudi 2 août à 10h30 et 12h15, place de l'Hôtel de ville), le poète de rue Maxime Guidot-Dejoux (mercredi 1er août, 11h30, place Yan-du-Gouf) et les vagabondages urbains de Garniouze (vendredi 3 et samedi 4 août à 17h30, place de l'Hôtel de ville). Le jeune public n'a pas été oublié avec une demi-douzaine de représentations dédiées le mercredi, le jeudi et le samedi matin.
Transmission
Après avoir fait la part belle aux femmes l'année dernière, Fugue en pays jazz a cette année choisi le thème de l'intergénérationnel. «Pour exister dans un monde où les festivals de jazz foisonnent, il faut sortir des sentiers battus», insiste Christian Nogaro. D'où cette idée de faire se rencontrer, au cours de trois soirées capbretonnaises et d'une Clôture aux champs à Saubrigues, vieux briscards des clubs et jeunes pousses prometteuses. «Les gardiens du temple auront plaisir à se frotter aux jeunes loups. Certains d’entre eux ont d’ailleurs choisi d’unir leurs destinées artistiques.»
On en aura l'illustration le jeudi 16 août dès 21h à la salle Nelson-Paillou. Sur scène se succéderont deux artistes de renom à la tête de formations composées de jeunes artistes en devenir. Daniel Humair, accompagné dans son New Quartet par trois musiciens plus jeunes que lui : Jean-Paul Celea à la contrebasse, Emile Parisien à la clarinette et Vincent Peirani à l'accordéon, inaugurera le concept. «Ce précurseur du jazz moderne sait s'entourer de nouveaux talents pour créer de nouveaux projets. Il précède les modes. C'est sa carte de visite.» Puis le trompettiste septuagénaire Enrico Rava, «qui n'est jamais venu dans la région», jouera avec son quintet composé de «petits jeunes de 25 ans».
Egalement au programme, le pianiste cubain Harold Lopez Nussa en duo avec le guitariste brésilien Swami JR, et le jazz manouche de l'Angelo Debarre quintet (vendredi 17 août, 21h, salle Nelson-Paillou). «Nous avions volontairement évité le poncif du jazz manouche à l'occasion des 100 ans de Django Reinhardt en 2010, car il y en avait un peu trop partout, et que nous avons la volonté de sortir des modes, reprend Christian Nogaro. Mais aujourd'hui, nous sommes heureux de présenter ce concert car il est difficile d'avoir plus festif, rythmé et authentique. D'autant que le guitariste Angelo Debarre est certainement l'un des plus grands passeurs de la musique manouche.»
La dernière soirée capbretonnaise s'ouvrira avec le Thomas Enhco trio. Le jeune pianiste (24 ans), petit-fils du chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus, a été nourri au swing dans l'école internationale Didier Lockwood. «Ce musicien exceptionnel empreint d'une culture jazz classique est une des futures stars du jazz, si ce n'est déjà fait.» C'est un autre grand du jazz qui lui succédera sur scène : Jacky Terrasson et son trio. Le quadragénaire a été repéré par le New York Times comme l’un des trente artistes susceptibles de changer la culture musicale des Etats-Unis dans les trente prochaines années, rien de moins. «Sa première intervention au festival de Capbreton promet un final d'exception.»
Programmes complets, tarifs et horaires : www.capbreton.fr