Côte Sud des Landes - N°72 - Mars/Avril 2006

La Région imagine le littoral du futur

Logement, développement économique, infrastructures, protection de l’environnement… toutes ces problématiques touchent de plein fouet le littoral. Alors que la loi du même nom fête ses 20 ans cette année, le Conseil régional a lancé une vaste démarche prospective pour réfléchir à l’avenir de ses côtes.

 

Les lois Pasqua du 4 février 1995 et Voynet du 25 juin 1999 invitent les Régions à réfléchir à leur avenir. Au-delà de la gestion quotidienne, le législateur a en effet estimé que le rôle d’un Conseil régional était de dessiner le profil de son territoire pour la génération à venir. En Aquitaine, cette réflexion baptisée «Aquitaine Horizon 2020» a été lancé en 2003. Le but est d’élaborer un Schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire (SRADDT) qui doit fixer des orientations de développement sur quinze ans.

A travers un questionnaire adressé à l’ensemble des Aquitains, et des séminaires thématiques organisés dans ses cinq départements, la Région a souhaité rassembler le maximum de contributions pour ce projet. Un temps abandonnée pour cause d’élections, la préparation du SRADDT a repris de plus belle en octobre dernier. Depuis, près d’une vingtaine de conférences se sont tenues à travers tout le territoire. Thématiques, elles ont abordé les sujets des équilibres territoriaux, des échanges, des transports, de la jeunesse, de la ruralité…

 

Le littoral en question

 

Le 13 décembre, à Capbreton, c’est la question du littoral qui a été traitée. Devant les élus et les acteurs du littoral aquitain, François Deluga, vice-président du Conseil régional, a animé les débats. L’enjeu : proposer des pistes pour «maîtriser et accompagner les phénomènes de littoralisation» et parvenir à un «aménagement durable et équilibré» de nos côtes. La tâche n’est pas aisée. De nombreux aspects doivent être pris en compte. «L’objectif est de préserver et développer durablement le littoral aquitain en répondant à ses besoins économiques et sociaux sans entacher et en valorisant un capital naturel et patrimonial unique», résume l’élu. Un vrai casse-tête en somme.

 

Maîtriser l’urbanisation

 

Le premier enjeu sera sans aucun doute de maîtriser le foncier. Avec 420 000 habitants répartis sur 105 communes, le littoral aquitain a connu, entre 1982 et 1999, une augmentation de sa population de 21 %. Presque deux fois plus que le reste de la région (12 %). Et l’attractivité du littoral ne devrait pas se calmer. Les études montrent que le littoral aquitain gagnerait plus de 100 000 habitants à l’horizon 2030 et que la barre des 500 000 habitants serait franchie en 2020. Un afflux de population qu’il faudra accueillir. La grande question du logement s’impose donc. «Actuellement, le prix du foncier exclut une partie de la population. Si on ne veut pas faire du littoral une zone où ne vivraient que des gens aisés, il faudra se doter d’outils performants», estime François Deluga. Les EPFL (Etablissements publics fonciers locaux), structures financières permettant aux collectivités adhérentes d’acheter du foncier pour mener à bien des politiques d’aménagement, en sont un exemple. D’ailleurs, la Communauté de communes Maremne Adour Côte Sud a adhéré le 19 décembre à l’EPFL «Landes Foncier» mis en place par le Conseil général.

Mais ces outils ne font pas tout. Il s’agit aussi de prendre les bonnes décisions pour «rationaliser» l’espace. «Pour construire des logements supplémentaires, il y a deux solutions : l’étalement urbain ou la densification des centres-villes», reprend le conseiller régional. Mais c’est évidemment pour la deuxième option qu’il prêche. «Vu l’attractivité du littoral, nous n’échapperons pas à l’augmentation des tailles des villes.» Mais avant de les faire s’élargir, il préconise de «réutiliser les espaces libres à l’intérieur des centres-villes». Cela permettra d’une part d’économiser l’espace, mais également de rentabiliser les VRD (Voies et réseaux divers) qui coûtent si cher aux budgets communaux.

 

Favoriser le développement économique

 

Outre un endroit rêvé à habiter, le littoral est également une plate-forme économique. Immédiatement, on pense au tourisme bien sûr. L’accompagnement de cette activité, ainsi que la prise en compte de sa saisonnalité, sont deux axes que le SRADDT devra traiter. «L’économie du tourisme est vieillissante, notamment en terme d’hébergements», souligne François Deluga. Et de comparer l’offre régionale à celle de pays tels que la Tunisie, où une semaine en pension complète, transport compris, coûte moins cher qu’une location au bord de l’océan. «Il faut adapter notre parc, proposer de nouveaux produits.» Fini l’hébergement sec, place à l’originalité : thermoludisme, écotourisme…

sl72-13ar.jpg«Mais aussi important soit-il, le tourisme ne représente que 40 à 50 % de l’activité du littoral. Les autres secteurs pèsent donc pour moitié dans cette économie», reprend l’élu. Services, commerces, industries, agriculture, pêche, ostréiculture, activités portuaires, filière bois… fonctionnent à longueur d’année, et cette orientation «d’économie durable» apparaît comme une force à encourager. Les besoins de formation devront être pris en compte et le développement des activités émergentes (univers de la glisse, filière nautique) favorisé.

Car tout est lié. «La population qui va venir s’installer ici aura besoin de travailler.» Or si le littoral n’est pas à même d’offrir des emplois à ses ressortissants, ces derniers devront se déplacer pour en trouver ailleurs. Infrastructures et transports en commun devront suivre en conséquence. Des économies pourraient donc être faites en développant l’économie locale. D’autant qu’avec «le renchérissement des matières premières et des énergies, la hausse des coûts de déplacement est inévitable. A nous de l’anticiper.»

 

Préserver l’environnement

 

Cependant, l’accueil de populations nouvelles autant que le développement de l’économie ne pourront se faire qu’à la condition de préserver le cadre naturel exceptionnel qui caractérise le littoral aquitain. «S’étendant de la pointe de Grave à la Bidassoa, il se caractérise par un massif dunaire long de 233 km avec plus de 750 km de rivages maritimes, lacustres et estuariens enrichi du triptyque lac-forêt-dune.» Les trois départements côtiers (Gironde, Landes, Pyrénées-Atlantiques) recèlent en outre 390 zones naturelles d’intérêt écologique. «Nous avons le littoral le plus riche et le mieux protégé d’Europe.» Encore faut-il le garder.

Diverses pistes sont donc avancées afin d’y contribuer. La protection des sites et la lutte contre les risques de pollution seront renforcées. Des dispositifs de prévention des risques naturels seront mis en œuvre. Il s’agit notamment de réfléchir à l’érosion marine et au trait de côte, aux lacs intérieurs et aux bassins versants, d’améliorer la qualité des eaux de baignade ou de diminuer les risques d’incendies… La gestion des ressources (eau, énergies renouvelables, forêt, recyclage des déchets) sera au cœur des réflexions. Tout cela dans le but de préserver les milieux naturels et les écosystèmes littoraux.

 

Des idées aux réalisations

 

L’ensemble de ces orientations seront inscrites dans le SRADDT dont la sortie est prévue en juin prochain. Mais entre un texte plein de bonnes idées et leur application sur le terrain, il y a parfois beaucoup de chemin. C’est pourquoi, le Conseil régional, les trois Départements du littoral et dix Communautés de communes ont créé en juillet dernier le Groupement d’intérêt public (GIP) Littoral. «Il sera le bras armé du SRADDT», et devra mettre en place les préconisations concernant le littoral. «Nous n’attendons plus que la signature de l’Etat pour le mettre en marche… et nous commençons d’ailleurs à nous impatienter.»

La structure devrait avoir un budget de fonctionnement de 500 000 € par an financé à parité par l’Etat et les collectivités (Région, Départements, CdC). Pour lancer la machine et «avoir un fonds d’intervention sur plusieurs années», ces dernières demandent une enveloppe de 50 millions d’euros à l’Etat. «C’est ce qu’a obtenu la région Languedoc-Roussillon

Pour mieux comprendre le rôle du GIP, François Deluga n'hésite pas à le présenter comme le successeur direct de la MIACA (Mission interministérielle d’aménagement de la côte aquitaine). Cette institution, dirigée pendant dix-huit ans par Emile Biasini, a permis, dans les années 1970, la mise en place d'une politique de développement soucieuse d’éviter l’urbanisation linéaire et de maintenir de vastes zones d’équilibre naturel entre les pôles urbains et touristiques. «A l’époque, le droit de l’urbanisme appartenait à l’Etat. Aujourd’hui, la décentralisation a donné le droit des sols aux communes.» Le GIP se devra donc d’être la structure de coordination des politiques locales visant le développement du littoral.

 

 

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